par Carol Sirou, CEO d’EthiFinance – Investir, Le journal des finances, numéro 2636 du 13 juillet 2024
Désormais, investir dans une entreprise, c’est faire confiance à ses capacités financières, à ses engagements stratégiques et c’est donner foi à sa trajectoire au regard de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance.
Chez EthiFinance, agence européenne de notation financière et extra-financière, nous avons mis en place l’organisation et le cadre méthodologique pour que la notation ESG devienne un véritable outil d’analyse prospective de ces engagements et apporte une opinion étayée. Nous concevons notre rôle comme celui d’un tiers de confiance pour les investisseurs.
Depuis le 1er janvier, la directive CSRD (corporate sustainability responsibility directive) nous apporte le « carburant » nécessaire pour aller vers une finance durable. Les entreprises vont devoir communiquer leurs données ESG, selon le référentiel fixé par la CSRD qui va s’appliquer par étapes d’ici 2027 en commençant, dès cette année, par les grands groupes.
D’ici trois à cinq ans, nous disposerons de données auditées, donc de meilleure qualité, plus fiables et surtout plus comparables. Nous connaîtrons aussi les plans de transition des entreprises basés sur une vision de double matérialité, c’est-à-dire en prenant en considération leurs risques et opportunités et leurs impacts sur leur environnement économique, social et environnemental.
Ce changement a été impulsé par l’accord de Paris de 2015 et par le Green Deal de 2019. Grâce à ce socle, l’Union européenne s’impose désormais comme le fer de lance mondial de la transition écologique et sociétale.
Aujourd’hui, nous voyons des entreprises européennes et des financeurs prêts à s’engager dans cette voie. Ils n’en contestent plus ni le bien-fondé, ni la nécessité, mais davantage les moyens et le calendrier à mettre en regard.
Les prochaines années seront donc cruciales pour tester la robustesse de ce reporting extra-financier qui nous oblige autant que les entreprises et auquel il faut se préparer. Si les données sont assez mesurables et comparables sur les enjeux environnementaux, de type émission de tonnes de CO 2, les critères sociaux sont plus difficiles à évaluer.
Il est nécessaire de développer des outils statistiques pour appréhender les problématiques, par exemple, d’une absence de parité ou de diversité au sein d’une entreprise. L’analyse des controverses – telle que nous la pratiquons – est également un outil déjà fort utile. L’opinion rendue sur le respect ou non d’une trajectoire ESG affichée et sur les informations recueillies dans le cadre du reporting extra-financier est d’ores et déjà de plus en plus prise en compte dans la notation crédit.
Un autre enjeu méthodologique concerne la coexistence de deux référentiels ESG : celui de l’Efrag (European Reporting advisory Group) dans l’Union européenne et celui extra-européen de l’ISSB (International Sustainability Standards Board). L’Efrag et l’ISSB se sont mis d’accord sur le principe d’interopérabilité entre leurs standards.
Ainsi si les grands groupes mondiaux devaient dès cette année se conformer à la norme européenne reposant sur la double matérialité, les deux normes devraient tendre à l’harmonisation pour faciliter l’exercice de reporting et de comparaison indispensable à leurs parties prenantes.
Pour embarquer les quelques 50 000 ETI et PME européennes réglementées par la CSRD, il est nécessaire d’adapter le standard Efrag aux réalités opérationnelles des entreprises de plus petite taille et de faire preuve de beaucoup de pédagogie. Construire des référentiels pertinents et adaptés aux organisations de toutes tailles pour les aider dans leur transition ESG est à portée de main, si la volonté politique est là.
Au-delà de ces ajustements méthodologiques, nous voulons œuvrer pour que la notation extra-financière dépasse la simple labellisation d’un reporting annuel pour devenir une opinion solide, fondée sur l’analyse prospective des engagements des entreprises.
Expert reconnu du métier depuis 20 ans dans l’accompagnement des entreprises, notre capacité à éclairer ces débats est indiscutable.
Pour les investisseurs, les marchés et les parties prenantes qui affichent et revendiquent leurs engagements durables, l’heure du choix responsable est arrivée.
Carol Sirou
CEO d’EthiFinance